La société Renault Trucks SAS, dont le siège se situe à Saint-Priest, est spécialisée dans la fabrication de véhicules poids-lourds. Filiale du groupe Volvo, la société a engagé à l’automne 2015 un projet d’externalisation d’une partie de ses fonctions supports dans le domaine informatique (IT). Ce projet, qui prévoit la suppression de cent soixante trois emplois au sein de l’entreprise, a été accompagné d’un plan de sauvegarde de l’emploi élaboré unilatéralement par l’employeur et validé par l’État par une décision du 16 février 2016.
Le comité central d’entreprise de la société Renault Trucks SAS et deux organisations syndicales ont saisi le tribunal afin d’obtenir l’annulation de cette décision en invoquant d’abord le caractère insuffisant de sa motivation, ensuite la définition irrégulière de nouvelles catégories professionnelles regroupant les salariés susceptibles d’être licenciés et, enfin, l’insuffisance des mesures d’accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l’emploi au regard des moyens dont dispose le groupe Volvo.
Par jugement du 31 mai 2016, le tribunal a prononcé l’annulation de la décision du 16 février 2016 homologuant le plan de sauvegarde de l’emploi après avoir relevé que la société Renault Trucks SAS ne justifiait pas du caractère pertinent et objectif des catégories professionnelles nouvelles concernant les « Chefs de projet » et les « Ingénieurs conseils » au regard de catégories professionnelles définies à l’occasion d’un précédent plan de sauvegarde de l’emploi.
La définition par le plan de sauvegarde de l’emploi du nombre de suppressions d’emplois et des catégories professionnelles concernées est une faculté ouverte par le code du travail. Il appartient alors à l’administration, invitée à se prononcer sur un tel document, de s’assurer, le cas échéant sous le contrôle du juge administratif, que les catégories professionnelles déterminées par l’employeur ne sont pas artificielles et prennent correctement en compte les fonctions similaires occupées au sein de l’entreprise.
Dans cette affaire, les requérants reprochaient à la société Renault Trucks d’avoir créé de nouvelles catégories professionnelles regroupant précisément les salariés dont le licenciement était envisagé en se fondant sur la spécificité des métiers orientés vers « l’infrastructure informatique » alors que d’autres salariés, exerçant leurs fonctions dans le secteur de « l’applicatif », étaient exclus de ces catégories.
Le tribunal s’est alors fondé sur différents éléments, tels que les enseignements dispensés pour l’obtention d’un diplôme universitaire dans la spécialité informatique, le profil de formation de différents ingénieurs exerçant les fonctions de chefs de projet ou d’ingénieurs conseils dans l’entreprise et sur l’expérience professionnelle de ces derniers, pour considérer que la société Renault Trucks ne justifiait pas du caractère pertinent et objectif de la création de nouvelles catégories professionnelles de « Chef de Projet Infrastructure IT » et « Ingénieur Conseil Collaboration & Infrastructure IT » regroupant un total de dix huit salariés alors que les catégories professionnelles antérieurement définies par l’entreprise, non reprises dans le projet d’externalisation en cause, de « Chef de projet IT / Chef de projet métiers IT » et « Ingénieur conseil IT » regroupaient cent quarante sept salariés.
Dans ces conditions, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi Auvergne Rhône-Alpes ne pouvait légalement homologuer le document unilatéral de la société Renault Trucks SAS et la décision du 16 février 2016 a été annulée sur ce seul moyen.
Tribunal administratif de Lyon, 31 mai 2016 Comité central d'entreprise de la STE RENAULT TRUCKS SAS, req. n° 1601671