Le tribunal a été saisi, le 12 janvier 2016, par le comité d’entreprise de la société Cenntro Motors France et par deux cent vingt six salariés d’une requête en annulation de la décision du 12 novembre 2015 par laquelle l’Etat a homologué le plan de sauvegarde de l’emploi élaboré par le liquidateur judiciaire de cette société employant alors trois cent soixante dix sept personnes.
Spécialisée sur le site industriel de Lyon Gerland dans la production et la commercialisation de véhicules utilitaires électriques, la société Cenntro Motors France a été placée en redressement judiciaire au printemps de l’année 2015 avec une période d’observation d’une durée de six mois. A l’issue de cette période et face à l’impossibilité de proposer un plan de redressement ou un plan de cession, la liquidation judiciaire sans poursuite d’activité de l’entreprise a été prononcée par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 30 octobre 2015.
Le liquidateur judiciaire a mis en œuvre un plan de licenciement portant sur l’ensemble des salariés de l’entreprise dans les conditions définies par les dispositions du code du travail issues de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi Macron.
Le document élaboré à cette fin par le liquidateur, fixant le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi, a été soumis pour homologation au directeur de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) de Rhône-Alpes dans les conditions définies par l’article L. 1233-58 du code du travail.
La décision du 12 novembre 2015 prise par le directeur régional de la DIRECCTE de Rhône-Alpes, faisant droit à cette demande d’homologation, a été ainsi contestée par les requérants devant le juge administratif, compétent pour statuer sur la légalité de telles décisions depuis la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi.
Par jugement du 5 avril 2016, la cinquième chambre du tribunal a prononcé le rejet de cette requête après avoir écarté les différents moyens d’annulation développés par les requérants.
L’une des questions tranchées par le tribunal portait sur les conditions dans lesquelles l’autorité administrative doit apprécier le caractère proportionné des mesures figurant dans le plan de sauvegarde de l’emploi au regard des moyens dont dispose une entreprise et, le cas échéant, le groupe auquel elle appartient. Au cas d’espèce, en raison de la liquidation judiciaire de la société Centro Motors France, cette appréciation devait se faire au regard des seuls moyens de l’entreprise et non au regard des moyens du groupe Cenntro dont elle fait partie.
Après avoir dressé l’inventaire des différentes aides prévues par le plan de sauvegarde de l’emploi, destinées à la formation et à la reconversion, à la création et à la reprise d’entreprise et à la mobilité géographique, le tribunal a relevé que si le liquidateur n’a pu mobiliser qu’une somme de 100 000 euros consacrées à ces mesures alors que le plan concerne la totalité des salariés, soit trois cent soixante dix sept personnes, la société Cenntro Motors France accusait un passif important, supérieur à trois millions d’euros, auquel s’ajoutaient notamment plus de 800 000 euros de dettes devant être réglées à des créanciers prioritaires. Dans ces conditions, la légalité de sa décision d’homologation a été confirmée sur ce point particulier.
La juridiction a également considéré que l’absence de consultation du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail sur le plan de sauvegarde de l’emploi n’a pas fait obstacle à son homologation par l’autorité administrative. Cette instance doit être en effet consultée lorsqu’une opération a pour objet ou pour effet de modifier de manière importante les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés de l’entreprise. Or, compte tenu de l’arrêt de toute activité de production et de commercialisation sur le site de Lyon Gerland suite à la liquidation judiciaire de l’entreprise sans poursuite d’activité, la consultation du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail n’était pas nécessaire.
Tribunal administratif de Lyon, 5 avril 2016 M. H et autres, req. n° 1600124